Table d'harmonie de la guitare

Pour commencer : pourquoi le choix de ces bois ? Il sont avant utilisés pour leur célérité du son.

Il faut savoir que la célérité du son dans l'air à 20°C est de 340 m/s, ce qui est très faible. Avec l'épicéa ou le cèdre on passe à 4500-6000 m/s, faisant de ces bois des matériaux extrêmement conducteurs de l'onde sonore. On les appelle les bois de résonance.

Deux types de barrages

La table d'harmonie ne serait pas ce qu'elle est sans son barrage, car c'est lui qui permettra de donner à la table ses caractéristiques mécaniques (souple, rigide) et acoustiques (projection, vibration). Deux types de barrages se distinguent pour la construction de la table d'harmonie : le barrage en éventail (guitare classique), le barrage en X (Folk). (Notons qu'il existe quelques variantes comme le barrage Kasha).

Le barrage en éventail

Même s'il n'en n'est pas l'inventeur (Pages et Panormo l'utilisaient déjà), c'est Antonio de Torres (1817-1893), le père de la guitare classique moderne, qui popularisa le barrage en éventail. A son époque, le diapason de ces guitares tournait déjà autour de 65cm. Il eu l'idée d'élargir les épaules et les hanches de la guitare afin d'obtenir un son plus puissant. Il galba aussi légèrement la table d'harminie afin de lui permetre d'avoir une meilleure résistance à la traction des cordes. Il fut alors en mesure de diminuer son épaisseur ainsi que celle des ses barrages. (C'est aussi lui qui fabriqua une guitare dont les eclisses et le fond étaient en papier mâché, afin de démontrer l'importance de la qualitée de la table d harmonie).

(photo: Fabrication des Guitares Classiques, Roy Courtnall, Editions H.Vial)
 

Barrage en X

Alors que l'Europe vit une vraie révolution avec les guitares de Torres, pendant ce temps Christian Friedrich Martin (1793-1873) émigre aux USA. Après avoir fabriqué ses premières guitares sur le modèle de Stauffer (son maître à Vienne), il introduit en 1839, afin de répondre aux exigences des cordes aciers, le barrage en X . Ce barrage offre un réel compromis entre la soliditée nécessaire demandée par ce type de cordes, et le besoin laisser vibrer la table le plus facilement possible.

Création de la table d'harmonie

Une fois l'arbre passé par le bucheron, certains luthiers achètent leurs grumes, afin de les débiter comme ils le souhaitent. D'autres passent par le scieur, comme dans notre cas.Voilà comment se présente une table d'harmonie au départ :

Critères de choix

Vous remarquerez (à l'exeption de de la partie extrème gauche de la table)que l'épicéa ne comporte aucun noeuds, et que la fibre n'est pas serrée : c'est ce qui nous intéresse. Lorsqu'on fabrique une table d'harmonie, l'absence de défauts sont des critères essentiels.

Le luthier choisi donc ses bois selon des critères macroscopiques bien définis :

• absense de noeuds,
• de fibres torses,
• grain fin et régulier,
• fil rectiligne,
• cernes d'accroissement
• largeur comprise entre 1 et 2mm,
• une certaine légèreté.

dans notre exemple, si vous regardez à droite, les fibres sont bien serrées et il n y a pas d'imperfections. Pour avoir le maximum de surface intéressante, nous allons ouvrir la table en 2 à l'aide une lame de scie.

Voici le résultat :

Comme vous pouvez le constater la table d'harmonie est ouverte comme un livre, et ce, afin d'obtenir une parfaite symétrie de part et d'autre du joint. Il s'agit à la fois d'une question d'esthétique, mais également de caractéristiques mécaniques et acoustiques. On cherche des fibres suffisamment serrées pour avoir une table d'harmonie qui puisse bien vieillir avec le temps.

La table ouverte :

Voici ce qu'on appelle effet sunburst : le ciel et la mer sont en parfaite symétrie par rapport à l'horizon.

Arrêtons-nous sur le joint de table :

Comme vous pouvez le voir, le joint de la table d'harmonie n'est pas préparé (on voit le jour entre les 2 parties). C'est une étape très délicate de la fabrication de la table d harmonie, le joint doit être parfait (pour éviter tout décollage dans le temps, et garantir une qualité acoustique maximale).

Le débit sur quartier

La photo ci-dessous vous montre les fils et la maille. Qu'est ce que c est que la maille ? Ce sont les tâches perpendiculaires aux fils. Dans notre cas, on peut voir que la table d'harmonie a été bien découpée sur quartier (la coupe sur quartier permet d'obtentir des plus belles planches). D'ailleurs lorqu'on achète sa guitare, si la finition est dite naturelle, c'est cela qu'il faut bien regarder.

Table d'harmonie dans la grume

Ci-dessus en rouge, la représentation de notre table d'harmonie dans la grume. C'est de cette manière que l'on obtient une coupe sur quartier.

Microstructure de l'Epicéa

Pour cette partie, laissons la parole à l'un des plus grand luthier Français, Daniel Friedrich :

Neuve, ma guitare était «verte», je l'ai «faite» en jouant dessus. En fait, ce guitariste n'a rien modifié de sensible. L'instrument s'est simplement stabilisé sous la tension des cordes (40 kg environ). D'autre part, en fonction de la résistance à la déformation de la table et du degré hygrométrique de l'environnement, on peut observer une modification plus ou moins heureuse de la « réponse ». II faut noter aussi que les résines, qui sèchent très lentement à l'intérieur de certaines cellules de bois de la table, peuvent opérer un collage interne de celles-ci. Dans le bois, les cellules longitudinales, ou trachéides, sont de minuscules tuyaux de quatre centièmes de millimètre de diamètre environ, reliés par des attaches plus ou moins fortes et qui constituent 90 % de la matière ligneuse de la table. Ces trachéides auront moins de souplesse avec des parois épaissies, solidifiées par ces dépôts, donnant ainsi moins d'amplitude aux mouvements vibratoires de la table, mais plus de caractère au son, éventuellement avec des pointes de résonance plus marquées et, hélas, moins d'homogénéité dans le niveau sonore des différentes notes. Remarquons encore que l'action des fréquences fournies par les cordes sur ces résines du bois ne peut les polymériser, les transformer. Le plus gros du spectre sonore d'une guitare classique se situe en dessous de 4000 Hz, et les quelques harmoniques plus élevés composant un La 880 Hz (17e frette du suraigu) sont encore trop bas et dénués d'énergie suffisante pour agir sur la matière résineuse. On pourrait aussi se demander si le travail mécanique appliqué à la table ne pourrait en modifier la matière. N'oublions pas que, joué d'une façon ou d'une autre, l'instrument, et spécialement sa table, est parcouru de vibrations, de frémissements intenses, de micromouvements rapides dont l'amplitude atteint un dixième de millimètre pour le Mi grave 82 Hz. Alors, comme pour un avion en fonctionnement prolongé, on pourrait théoriquement penser à une fatigue du matériau due à cette agitation, d'ailleurs combinée avec la tension permanente des cordes. Tout cela n'entraînerait-il pas un début de dislocation des cellules ? Mais, en dépit de tous ces facteurs de caractère très général, on peut dire que l'influence de la technique de jeu personnelle du guitariste paraît nulle.

(extrait : Le guide de la Guitare - Hors série Février 1980)

Une dernière photo avec une table en red cedar afin de voir la différence de couleur entre ces 2 bois :


 

Couleur sonore

Pour l'épicéa, d'une façon  générale, le son sera plutôt teinté dans les médiums aigus, avec pour certaines espèces, un son très cristallin et clair. Il faut également savoir qu'une table en épicéa demande à être jouée pendant assez longtemps afin de révéler toutes ces caractéristiques.

Quand au cèdren il donneras des tables avec plus de basses, de rondeur. Au contraire de l'épicéa, il donnera toute sa puissance très vite.